En Bretagne, le credo d’un médecin de campagne

lequotidiendumedecin.fr 23/04/2012

Au lendemain du premier tour de la présidentielle, un généraliste installé en zone rurale témoigne du problème de la désertification médicale. Les propositions des candidats le laisse sceptique.

Presque 13 heures, le Dr André Fontaine vient de raccompagner son dernier patient de la matinée et s’apprête à enchaîner – sans pause – ses visites... Mais, en ce lendemain de premier tour, il ne boude pas son plaisir de pouvoir faire partager son regard sur l’avenir très proche des zones rurales, lui qui exerce dans l’une d’entre elles depuis maintenant 12 ans.

Sa réflexion le conduit d’abord à se pencher sur la donne actuelle. S’appuyant sur les chiffres de la densité de médecins généralistes (tous statuts confondus) fournis par l’Observatoire européen de la démographie médicale, il s’interroge sur une densité française presque deux fois plus élevée qu’au Royaume-Uni ou en Allemagne. « Je me demande vraiment où sont ces 2,1 médecins généralistes pour 1 000 habitants que l’on compte en France… Probablement sur des postes salariés », suppose André Fontaine.

Mais, c’est surtout la position de la plupart des candidats du premier tour qu’il trouve étrange : « Ils proposent tous d’augmenter le numerus clausus... Ça laisse entendre que nous serions bien en deçà des moyennes européennes, non ? », s’interroge-t-il faussement. Et de poursuivre : « Avec 0,2 médecin généralistes pour 1 000 en Roumanie, franchement, piquer des médecins roumains, c’est un peu gros ! »

Faciliter l’installation des médecins seniors

Pour autant, le Dr Fontaine est tout à fait convaincu de l’urgence qu’il y a à trouver des solutions pour répondre au manque de médecins de campagne. Lui est arrivé à Allaire (Morbihan) à la faveur d’une annonce parue dans la presse professionnelle, et sans être capable de situer sur une carte ce chef-lieu de canton du Pays de Redon. Il venait d’une grande ville du Nord (dont il préfère taire le nom pour ne pas lui faire de mauvaise publicité), quittée sur un coup de tête après une agression sans violence physique.

Son parcours le place au cœur du problème moderne de la désertification médicale.

« Dans les cinq prochaines années, je vais arrêter avec deux autres généralistes, soit la moitié des médecins de la ville, explique André Fontaine. Les autres communes vont connaître des départs aussi, certaines n’ont pas réussi à trouver de remplaçant à leur dernier médecin... L’activité est pourtant très intéressante ici. Nos remplaçants nous le disent. Les patients sont exigeants, veulent être écoutés, examinés mais ils sont gentils et respectent le médecin. Mais, comme partout en Bretagne, dès qu’on s’éloigne un peu des grands centres urbains, on rencontre des difficultés pour attirer de nouveaux confrères... Nous sommes pourtant à équidistance de Vannes, Rennes et Nantes, proche du Golfe du Morbihan, de Guérande et La Baule... »

Le credo du Dr Fontaine ? L’accueil de médecins seniors qui, comme lui il y a douze ans, auraient envie de changer de pratique et de lieu de vie pour leurs dernières années d’exercice. « La seule proposition d’un candidat que je trouve positive, c’est celle de Hollande qui veut alléger les charges des médecins retraités qui poursuivraient leur activité. Sinon, c’est impossible. »

› CORRESPONDANT OLIVIER QUARANTE

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